Égypte : entre grâces et répression contre les opposants

Actualité Africaine

La libération d’Alaa Abdel Fattah a été suivie presque aussitôt par de nouvelles arrestations en Égypte, confirmant la mécanique implacable d’une répression qui alterne gestes d’apaisement et retours en prison.

Le 22 septembre, le président Abdel Fattah Al-Sissi annonçait la grâce d’Alaa Abdel Fattah, 43 ans, figure centrale de la contestation depuis 2011. Présentée par la presse progouvernementale comme un signe de clémence présidentielle, cette libération semblait ouvrir la voie à une détente politique. Mais l’illusion a été de courte durée. Dès le 24 septembre, la police arrêtait le chercheur Ismaïl Alexandrani, déjà visé à plusieurs reprises par la justice. Le lendemain, Ahmed Douma, autre militant emblématique, était convoqué devant le procureur de la sécurité d’État pour la cinquième fois en un an, selon le site indépendant Al-Manassa.

Cette succession rapide d’événements illustre la stratégie d’un pouvoir qui accorde des gestes de grâce tout en maintenant la pression sur ses opposants. Les arrestations récurrentes participent d’un cycle où la liberté est toujours provisoire, et où les dissidents demeurent sous la menace constante d’un retour derrière les barreaux. Abdel Fattah lui-même en est un symbole : libéré une première fois en 2019, il avait été de nouveau arrêté six mois plus tard et condamné à une lourde peine, avant sa récente amnistie.

Les observateurs soulignent que ce double jeu politique vise à envoyer un message contradictoire : d’un côté, le régime se pare d’une image d’ouverture pour répondre aux critiques internationales sur son bilan en matière de droits humains ; de l’autre, il réaffirme son contrôle absolu en réincarcérant aussitôt de nouvelles figures contestataires. Une mécanique qui maintient une atmosphère d’incertitude et de peur au sein de la société civile égyptienne.

Les organisations de défense des droits humains dénoncent régulièrement cette stratégie. Amnesty International et Human Rights Watch pointent une « instrumentalisation de la grâce présidentielle » destinée à redorer l’image d’Al-Sissi auprès de ses partenaires étrangers, tout en neutralisant sur le terrain toute velléité de mobilisation. Ces pratiques interviennent alors que l’Égypte continue de dépendre du soutien financier de ses bailleurs internationaux, notamment le FMI et l’Union européenne, qui conditionnent une partie de leur assistance à une amélioration du climat politique.

Pour de nombreux opposants, la prison reste donc la norme et la liberté l’exception. Derrière l’effet médiatique des grâces présidentielles, la répression demeure intacte, marquant la persistance d’un régime autoritaire qui refuse de relâcher son emprise sur la société.

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